Artpress 2
MAC/VAL : Ce que l’art contemporain fait à la littérature (ed.)
art press 2 n°26, juill.-sept. 2012
Ce numéro d’artpress2 relaye et étend un cycle d’interventions que j’organisai au Mac/Val tout au long de l’année 2011 sous le titre ‘Under the Influence’. Cette programmation conviait des écrivains (poètes, théoriciens, romanciers, critiques) à produire une réflexion – qu’elle prenne la forme d’une conférence, d’une lecture, d’une visite guidée, d’une performance etc. – à partir d’une question précise, et à observer une contrainte. La question : ‘Comme écrivain, vous arrive-t-il de vous inspirer des dispositifs de l’art, au point de vous en approprier les opérations (qu’elles soient pratiques, formelles, cognitives, économiques etc.), mais en vue de les faire travailler dans l’écriture même ?’. La contrainte : prendre appui, pour répondre, sur une ou plusieurs œuvres de la collection du musée. Subsidiairement : ‘Comme l’un des divers lieux où les œuvres d’art se construisent et se montrent aujourd’hui, le musée lui-même peut-il – grâce ou contre les différentes procédures, discours, machineries, inerties qui le constituent – déclencher ou accompagner un tel redéploiement de l’écriture ?’. Recueillant les réactions d’une quinzaine d’auteurs (dont plus de la moitié s’était prêtée à cette réflexion au Mac/Val), ce numéro interroge ainsi ce qui, dans les pratiques artistiques, concerne directement les pratiques textuelles via d’éventuels effets de translation, de correspondance ou de contagion, ce qui en réinitialise les procédés comme on dit d’une machine, et leur (ré-)apprend à jouer – fût-ce en ‘ratant mieux’, sachant que ces captations aboutissent rarement selon une loi, qu’elles dysfonctionnent même, le plus souvent. Les propositions recueillies ici ne se parent donc d’aucune valeur de manifeste ou de mode d’emploi global. C’est au contraire localement, dans le rapport de telle écriture à telle façon de faire œuvre, que travailler sous influence prend son sens de (re-)détermination active : se rendre disponible, savoir saisir ce qui fera devenir.
Cette méthode supposait un cahier des charges hybride, accueillant différents régimes de textes : littéraires ou conceptuels, ou les deux. Ecart réflexif, discours de la méthode, art poétique (entre autres façons de traiter la question) : une grande liberté de style et de format fut prise par les auteurs invités. Certains objectivant leur relation à l’art dans la distance descriptive d’un récit, théorique ou littéraire. D’autres l’implémentant plus directement dans un dispositif textuel. Tous la jouèrent dans l’écriture même – le Mac/Val se révélant, dans ce jeu avec sa collection, comme le bureau de change de cette circulation entre pratiques.
Avec des contributions de S. Airaud, A.-J. Chaton, Y. Ciret, E. During, J.-M. Espitallier, A. Fabre, J. Game, L. Giraudon, Ch. Kihm, F. Lamy J. Mouton, Ch. Pennequin, N. Quintane, O. Rosenthal, T. Samoyault, D. Zabunyan, D. Zerbib.
Ce numéro d’Art Press 2, dont la direction a été confiée à Jérôme Game, (…) s’interroge sur la manière dont l’art contemporain influence la littérature, en réfléchissant aux dispositifs que permet le MAC/VAL. (…) Dans la relation de face à face avec l’œuvre, mais aussi avec ceux qui sont là, devant lui, le locuteur fait passer bien autre chose que des informations. Le projet de résidence de Game a ainsi permis de rendre à la parole poétique et critique, en même temps que sa chair, sa performativité : dire est à nouveau faire, interagir, faire circuler des affects, communiquer des mouvements. En somme, la parole se trouve re-située : dans l’espace de sa profération, dans un corps, dans un contexte, historique autant que social et politique, ou sociologique.
Guillaume Condello, Sitaudis, 2012