Polyèdre

suivi de

La Tête bande

Voix, 2001

ISBN 2 – 9514799-​16 – 6

n.m. (1690 ; gr. poluedros).
Géom. Solide limité de toutes parts par des polygones plans. Polyèdre convexe. Polyèdre régulier. Polyèdre (concave) à faces étoilées.

Polyèdre : ce ‘solide limité de toutes parts par des polygones plans’ et qui pourtant ne durcit pas, ne parvient pas à sécher, mais reste en mouvement, se reconstitue lentement, comme un cristal, c’est en fait un langage. Une poésie comme pli engageant les plans du corps, du langage lui-​même, et du pouvoir. Diffraction de la face, de l’autre côté du plan, là où l’horizontal et le vertical s’équivalent, là où le creux et le protubérant s’agencent. Faire tourner sur lui-​même le bloc pouvoir-​langage-​corps, d’ordinaire si fixe et si compact : lui mettre le mouvement dedans, le faire flux à force de présence massive : tel est l’objet du présent ouvrage.

Jérôme Game pense le poème comme une force d’éclatement des discours et des figures (d’où le tournis prismatique du polyèdre). (…) En somme, ça trace quelque chose comme le vide du désir informe dans la placidité des formes. Ça cabre la tension d’un corps rétif à toute nomination dans l’ordre convenu des noms qui forment pour nous le monde. (…) Écrire, ainsi, dégage l’espace, le rend, comme disait Bataille, ‘voyou’. (…) Ceux que sollicite le mouvement de l’invention dans la poésie française d’aujourd’hui ont à mon sens tout intérêt à suivre l’évolution du travail de Jérôme Game sur la singularité duquel on ne saurait dès à présent trop insister.

Christian Prigent, Cahiers Critiques de Poésie n°3, 2001