RÉUNIS : SÉPARÉS

Une exposition de Pierre Coulibeuf et Jérôme Game

Installations textuelles, visuelles, et sonores /​Films, photographies, vidéos
La Filature – Scène nationale de Mulhouse
, septembre-​novembre 2025
Commissariat : Emmanuelle Walter
Production : La Filature – Scène nationale de Mulhouse

Empruntant son titre à Maurice Blanchot, cette exposition réunit un cinéaste, Pierre Coulibeuf, et un poète, Jérôme Game, plasticiens tous les deux, autour d’une invitation à imaginer des correspondances, des écarts aussi bien, comme des rebonds entre leurs univers et pratiques respectifs.

Diffractant leurs images, leurs mots et leurs sons à travers l’espace d’exposition, c’est à une recomposition du récit, de l’interlocution ou de la narration qu’ils se livrent alors, interrogeant ce que le visuel doit au texte ou celui-​ci à la parole, au cadrage ou au séquençage.

Tout au long de ces parcours croisés, c’est bien les corps – percevant, se mouvant, s’offrant aux regards – qui activent le montage virtuel qu’est l’exposition.

Frises
Impressions de lettrage en vinyle adhésif
2025

Travaillant à conjoindre le voir et le lire par leur dispositif spatial (hauteur et longueur du texte sur les cimaises près du plafond) via le corps du public (amené à se déplacer dans la galerie pour ‘poursuivre’ sa lecture), les Frises veulent faire entendre un sens qui vole de ses propres ailes et s’affranchit des logiques habituelles.

Quelque part entre la didascalie, le sous-​titre et la voix off, l’enjeu est de faire tenir une histoire-​phrase-​ligne en un seul tenant, un seul élan.

Audioguides
Diffusions audio sur enceintes murales
Texte, voix : Jérôme Game
Réalisation sonore : Yvan Étienne
2025

Faire percevoir des personnages, du décor, du regard (des regards), simultanément abstraits et concrets — suffisamment en tout cas, pour servir de surface de projection ‘oétique à un public en train de déambuler dans l’espace d’exposition — et précis aussi, pour stimuler ses dés/​identifications imaginaires en lien avec ce qu’il voit alentour : c’est l’ambition de ces Audioguides.

Dans les interlocutions comme dans les récits ainsi diffusés dans l’espace, on ne sait trop si les thèmes ou motifs sont d’eux-mêmes illogiques ou simplement parasités par une petite friture dans l’énonciation. Et dans le léger trouble de l’audition ainsi créé, on se demande s’il s’agit d’une bande originale, d’un script ou d’une critique qu’on entend là, comme en larsen à ce qu’on voit sur les murs.

Cartels
Impressions sur papier contrecollé sur carton, fixation, éclairage mural
2025 

Dans les Cartels, c’est le dispositif expographique et son discours qu’on s’approprie pour la distance qu’ils permettent de créer entre, d’une part, ce qui est dit de ce qui est montré, et d’autre part, cela même qui est montré : à côté d’une ostensible absence d’œuvre au mur (de photographie, pour être plus précis), un texte, tel un ‘vrai’ cartel, commence par en remplir la fonction usuelle (fournir au public des éléments techniques, biographiques, ‘hématiques etc., sur un expôt et son auteur). Mais très vite, il fait cela de manière digressive, comme en biais. Un peu comme un à côté de qui créerait un à la place de, mais incertain, étrangement im/​précis.

Le pari de l’œuvre est que dans l’écart ainsi creusé entre le dicible et le visible (et entre le dicible et lui-​même), l’indiscernable, l’inidentifiable même, de la représentation ouvrent au public actif un espace ‘arratif et symbolique émancipé, dans lequel l’imaginaire au travail devient photographe.

Identification d’une image pourrait-​on dire, en paraphrasant un illustre cinéaste italien.